jeudi 29 juillet 2010

RIBOUD 'DANONE MISE SUR LA SANTE ET LE PLAISIR

Riboud : «Danone mise sur la santé et le plaisir»

Le Figaro

Le 27 juillet 2010

Par Ivan Letessier


Franck Riboud, le PDG de Danone, compte sur sa R&D pour lancer de nouveaux aliments.

Activia pourrait se diversifier en dehors du yaourt, avec des produits à base de fruits.


LE FIGARO. - Quels sont les ressorts de

la bonne croissance de vos ventes au

premier semestre ?

Je salue ces bonnes performances. Il ne

faut pas oublier qu'elles interviennent dans

un contexte de crise. C'est la démonstration

parfaite que la stratégie mise en place est la

bonne. La focalisation sur les volumes

nous a permis de gagner des parts de

marché dans tous les métiers et dans tous

les pays. Nous recueillons les fruits de

l'internationalisation du groupe vers les

pays émergents. Dans un environnement

qui reste très tendu, nous sommes

optimistes pour Danone, sereins et

concentrés. Nous sommes sereins car nous

avons nos marques, nos métiers, des

équipes focalisées sur leur stratégie. Nous

sommes plutôt France 1998 en terme

d'équipe!


Vos marges, en revanche, ont reculé.

Votre modèle de croissance de crise estil

pérenne ?


Notre objectif reste de maintenir cette

année notre marge stable et de reconduire

notre niveau de 2009, 15,3%, notre record

et l'une des plus hautes marges du secteur.

Il n'y aura pas de baisse, mais nous ne

poussons pas non plus les feux au-delà car

les arbres ne montent pas jusqu'au ciel:

nous voulons construire sur des bases

solides et nous ne sommes pas là pour faire

du court-termisme. En 2010, nous

continuons à raisonner d'abord en parts de

marché, plus qu'en progression de marges.


Comment allez-vous réaliser

500 millions d'économies en 2010 ?


Les gains de productivité portent sur

différents facteurs: la façon d'acheter du

lait en poudre pour la Chine, l'amélioration

des recettes de certains produits, les efforts

de réduction des émissions de CO2 liées

aux emballages. À un rythme de 5 millions

de bouteilles d'Evian vendues chaque jour,

nous pouvons faire des économies de

plastique. Nous avons lancé des

programmes de gains de productivité tous

azimuts. Sur ces 500 millions d'économies,

il n'est pas prévu de restructuration sociale.


Quelles sont vos perspectives sur

l'évolution de la conjoncture et des

tendances de consommation en Europe

de l'Ouest ?


Nous faisons l'hypothèse que nous

resterons sous pression au cours des cinq

années qui viennent. L'évolution de la

consommation dépendra beaucoup de celle

de la grande distribution. En Espagne, il

n'y a plus que le leader, le n° 2 et les

marques de distributeurs. Cette tendance

va s'accélérer en raison de la rationalisation

des coûts et des gammes. Notre objectif, en

tant que leader, c'est d'avoir une relation

commerciale construite sur le long terme et

de contribuer à la croissance de nos

catégories. Notre capacité d'innovation

aidera à la croissance de nos volumes et à

la bonne tenue de nos marges soit avec des

produits qui justifient des prix plus élevés,

soit avec des produits milieu de gamme

mais qui dégageront des marges

importantes grâce à des innovations

technologiques et des manières de produire

plus économiques.


Le positionnement «santé» de vos

produits a longtemps tenu lieu de

stratégie d'entreprise. Vous misiez sur

votre R & D pour faire de la publicité

avec des allégations santé. Votre

stratégie semble évoluer…


Le positionnement de Danone a toujours

été axé sur la santé et le plaisir. C'est la

façon de l'exprimer, l'exécution marketing

qui doit s'adapter à ce contexte. Nous

avons publié nos études cliniques, nos

consommateurs peuvent y avoir accès. De

plus, nous avons aujourd'hui une nouvelle

corde à notre arc avec la marque Nutricia,

acquise en 2007. Si l'un de ses produits,

Fortimel, est aujourd'hui prescrit sur

ordonnance, nous pouvons très bien

imaginer le rendre beaucoup plus

accessible à l'avenir en nous appuyant sur

nos études cliniques. J'ai d'ailleurs coutume

de dire que le métier le plus important de

Danone pour l'avenir, c'est sans doute le

plus petit, la nutrition médicale, qu'il

s'agisse de travailler sur les allergies des

enfants, sur la façon de préserver

l'indépendance des personnes âgées, etc.

Nous nous intéressons à des niches très

précises de la vie quotidienne avec des

produits grand public.


Pourquoi ne pas vous passer

d'allégations sur vos produits, à l'instar

de Nestlé?


C'est l'inverse que nous souhaitons faire!

Lorsque je vois un gamin au Bangladesh

dont les diarrhées à répétition réduisent de

30% l'immunité, j'aimerais lui faire

bénéficier de produits qui améliorent sa

flore intestinale. Nous sommes convaincus

que nos études cliniques participent à la

santé par l'alimentation. Mais

l'alimentation n'est pas un médicament, et

le plaisir fait partie de la santé. Si Activia

est le meilleur yaourt que l'on puisse

trouver, cela n'en fait pas pour autant un

médicament!


Allez-vous réorienter vos efforts de

R&D?


La recherche n'est plus uniquement là pour

inventer des produits aux bénéfices santé

vendus très chers, mais pour donner accès

à nos produits au plus grand nombre. Elle

sert aussi à travailler sur le processus

industriel, la baisse de durée de la

fermentation…


Votre partenariat avec Chiquita vous

permet d'élargir votre portefeuille aux

jus de fruits…


Ce n'est pas un élargissement aux jus, mais

aux fruits, comme nous l'avons fait avec

nos compotes Taillefine. Nous ne

souhaitons pas devenir un concurrent de

Tropicana ! Nous apprenons un nouveau

métier. Chiquita connaît le process, nous

savons valoriser les produits. Ensemble,

nous arriverons avec de nouveaux

packagings, de nouveaux concepts… Nos

produits, qui auront des déclinaisons en

fonction des pays, seront disponibles en

2011 en Europe de l'Ouest.


Pourrait-il y avoir d'autres évolutions

dans le périmètre du groupe?


La réponse est oui! J'ai déjà goûté en

laboratoire de nouveaux produits. Nous

n'excluons pas de décliner Activia dans

d'autres formats que le yaourt. Avec Petit

Gervais, nous testons des yaourts en

poudre auxquels il n'y aurait qu'à ajouter

de l'eau. Inventer de nouveaux produits,

cela veut dire aussi inventer de nouveaux

canaux de distribution. Evian teste ainsi la

livraison à domicile à Paris. Le site

myevian.com, lancé en février, permet de

customiser ses bouteilles d'eau à l'occasion

d'un événement. Cette nouvelle forme de

commercialisation marche très bien et

commencera à représenter en 2011 une

part non négligeable du chiffre d'affaires

de la marque.



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